Démarche diagnostique des affections neurologiques

Étape 4 : Examens complémentaires

Examens complémentaires sur animaux vivants :

  • Prélèvements et examen sur LCR :

Le prélèvement de liquide céphalo-rachidien (LCR) peut être réalisé assez facilement et sur animal vigile chez le veau et l’adulte au niveau lombo-sacré, et plus difficilement au niveau atlanto-occipital, cet emplacement nécessitant de l’expérience et une sédation pour la sécurité du manipulateur et de l’animal.

Le LCR doit être ensuite examiné dans les trente minutes suivant le prélèvement pour que les examens cytologiques soient pertinents, ce qui est quasiment impossible en pratique rurale courante. Un LCR normal est clair et translucide.

L’examen cytologique permet la mise en évidence d’une inflammation lorsque le comptage de cellules nucléées dépasse vingt cellules nuclées par mL de LCR. Une hémorragie, parfois iatrogène due au prélèvement, peut aussi être visible à l’examen cytologique, tout comme un processus néoplasique, ce dernier étant assez peu fréquent chez les bovins, ceux-ci étant souvent abattus avant que des processus néoplasiques puissent se développer. L’observation de leucocytes et leur identification peut permettre d’affiner le diagnostic de la cause des symptômes neurologiques, par exemple une part importante de cellules mononucléées peut permettre d’orienter vers une listériose ou une affection virale, tandis qu’une quantité de cellules très importante (se comptant en centaines de milliers par mL) avec une majorité de polynucléaires neutrophiles oriente plutôt le diagnostic vers une méningite bactérienne (6).

Valeurs usuelles du LCR des bovins :

ParamètresValeurs usuelles chez les bovins
Densité1.004-1.008
Indice de réfraction1.3343-1.3349
Protéines (mg/dL)20-40
Leucocytes (cellules/microL)0-3
Glucose (mg/dL)35-70
Sodium (mEq/L)132-144
Potassium (mEq/L)2.7-3.2
Créatine kinase (UI/L)2-48
Magnésium (mEq/L)1.7-2.7
D’après Millemann Y, Fontaine J-J, Arcangioli M-A, Douart A, Maillard R. Les principales affections bactériennes du système nerveux central des bovins. Bull GTV Hors-sér Neuropathol Rumin 2003. 2003;41‑6.
  • Prélèvements et examens sur sang :

Les prises de sang chez les bovins peuvent être réalisées au niveau de la veine jugulaire ou de la veine sous-caudale.

Dans le cas des méningites et encéphalites, les marqueurs classiques de l’inflammation, visibles sur une numération formule sanguine (neutrophilie, mesure du fibrinogène ou leucocytose), n’apportent pas d’importants compléments d’informations pour le diagnostic.

A l’inverse, la biochimie sanguine permet d’identifier des anomalies métaboliques, notamment au niveau des minéraux comme le calcium, le phosphore, le potassium ou le magnésium mais aussi des anomalies d’électrolytes et peut aider au diagnostic d’encéphalose hépatique.

  • Prélèvements et examens sur fèces :

Le prélèvement des fèces doit être réalisé directement dans le rectum de l’animal, pour éviter toute contamination extérieure, et être conservé au frais si l’analyse coproscopique ne peut être réalisé rapidement.

Le prélèvement de fèces peut aider à la détection des coccidioses, maladie pouvant avoir une forme nerveuse. Il permet aussi d’évaluer la consistance, la couleur et la fibrosité des bouses, qui sont des indicateurs de bon fonctionnement ruminal et digestif.

Examens complémentaires sur animaux morts :

  • L’autopsie :

L’autopsie permet de mettre en évidence des lésions sur les organes. Dans le cas des atteintes nerveuses, l’encéphale et des segments médullaires pris à différents niveaux sont les prélèvements de choix. Cependant, le prélèvement de l’encéphale doit se faire sans atteinte de l’obex, qui doit rester intact pour les contrôles liés à l’Encéphalopathie spongiforme bovine. De plus, l’encéphale et la moelle épinière font partie des matériels à risque spécifiés (MRS) (selon le règlement CE n°999/2001 du Parlement européen et du conseil du 22 mai 2001) et leur élimination doit donc être faite de façon rigoureuse.

 Les lésions au niveau de l’encéphale ne sont généralement pas visualisables au niveau macroscopique, seules les analyses histopathologiques ou des analyses de microbiologie peuvent permettre en évidence des lésions ou des affections. Selon les signes cliniques présents avant la mort de l’animal, le prélèvement de certains organes peut être pertinent, tout comme le contenu ruminal ou des urines, en cas de suspicion d’intoxication par des végétaux notamment.

L’autopsie peut aussi être pertinente lors de mort subite inexpliquée d’un animal ou d’un lot. Cependant, le vétérinaire doit toujours garder à l’esprit la suspicion de charbon causée par Bacillus anthracis, et en cas de doute sur la possibilité d’une atteinte, l’autopsie ne devra pas être réalisée.

  • Analyses histopathologiques

Les analyses histopathologiques peuvent être un diagnostic de certitude pour de nombreuses affections, notamment les affections d’origine génétiques. N’étant pas spécifiques d’une maladie comme peut l’être la PCR, l’histopathologie permet d’orienter les hypothèses diagnostiques ou de confirmer une suspicion clinique, associée aux examens de microbiologies. En effet, la détection d’une bactérie ne suffit généralement pas à la rendre responsable de l’affection, si aucune lésion microscopique n’est corrélée à sa présence. Certaines bactéries peuvent cependant être incriminées lorsqu’elles sont détectées, comme Listeria sp. par exemple.

L’unique limite de l’histopathologie est la qualité du prélèvement et son conditionnement. Si le prélèvement est de mauvaise qualité ou abimé par de mauvaises conditions de conservations, alors les observations ne pourront être réalisées dans de bonnes conditions.

  • Analyses microbiologiques

Les analyses microbiologiques comprennent les isolements bactériens ou viraux, et la détection des anticorps ou des antigènes liés à ces pathogènes. Elles peuvent aussi permettre la mise en évidence de protéines « anormales » comme les prions. L’un des prélèvements de choix est l’encéphale, mais les prélèvements doivent toujours être adaptés aux signes cliniques de l’animal ou des animaux avant leurs morts. Il faut cependant toujours garder à l’esprit que la présence d’une bactérie ou d’un virus n’est pas une preuve de son implication dans l’affection, sauf si cette présence est corrélée à des lésions.