Intoxication par le plomb

= Saturnisme


Epidémiologie : Causes accidentelles ou malveillance. Affection assez fréquente, touche souvent un même lot ou des animaux du même âge. Les vaches ont une sélectivité faible pour leurs aliments, et peuvent lécher ou ingérer des corps étrangers contenant du plomb. (1) Certaines peintures, des huiles de moteur, des plombs de chasse ou des batteries contiennent du plomb, peuvent être en contact avec les animaux. Le niveau d’absorption du plomb varie selon l’âge de l’animal (1-3% d’absorption chez l’adulte, jusqu’à 50% chez les veaux de lait, selon la forme sous laquelle le plomb est ingérée (1)), les veaux de lait sont donc plus touchés que les adultes ou les veaux sevrés (une dose de 2 mg/kg/j peut entraîner des cas de morts subites chez des veaux (2)). De plus, les carences en calcium, fer et zinc favorisent l’absorption du plomb et donc la survenue d’une intoxication (2).


Toxicité variable du plomb selon sa forme : acétate > chlorure > sulfate > oxyde (3).


Doses toxiques : Variables, selon dose et exposition aiguë ou chronique. Une dose unique de 1 g/kg de poids vif peut entrainer des signes de mortalité aiguë, mais une exposition quotidienne à 2 ou 3 mg/kg de poids vif peut ne pas entraîner de signes cliniques avant un mois. L’apparition des signes cliniques dépend de l’âge, de l’alimentation, du pH ruminal, des niveaux de plomb précédemment présents dans l’alimentation ou l’environnement de l’animal. (1) Dans les cas d’intoxications aiguës, une dose toxique de 400 à 600 mg/kg de PV pour les veaux et de 600 à 800 mg/kg pour les bovins adultes est retenue (4).


En résumé, la période d’incubation est raccourcie, l’intensité des signes cliniques et la mortalité sont augmentées avec l’augmentation des doses de plomb.


Durée d’incubation : Le délai d’apparition est souvent inconnu. Les données connues donnent une durée d’apparition des signes cliniques entre 12h et 15 jours, variant selon la dose et les circonstances d’intoxications. (2)


Signes cliniques évocateurs : signes nerveux et digestifs si l’intoxication est modérée à sévère. Clinique très polymorphe. Association de signes nerveux et digestifs.

  • Signes nerveux précoces (niveaux peu élevés de plomb) : ptyalisme, bruxisme, tremblements musculaires, hyperesthésie, incapacité à attraper la nourriture (dysphagie)
  • Signes nerveux plus tardifs ou cas d’intoxication à doses plus importantes : amaurose, convulsions, postures anormales, déambulation, marche en cercle, mouvements spastiques de la face, pousser au mur, vocalises, bruxisme marqué avec abondance de salive mousseuse, agressivité possible. Morts subites possibles.
  • Signes digestifs :
    • Intoxication aiguë : ptyalisme, diarrhée avec selles sombres et ténesme
    • Intoxication chronique : stase ruminale, météorisation, anorexie, alternance diarrhée et constipation, dysphagie
  • Autres signes cliniques: dépression


Diagnostic différentiel :


Diagnostic expérimental : Mesures des taux de plomb dans le sang et les tissus permet un diagnostic de certitude (sang total, foie ou rein) : intoxication confirmée si > 0.5 mg/L (ou 0.35 ppm) dans le sang ou > 10 ppm dans le foie et la médulla rénale (valeurs plus élevées chez le veau). Une exposition chronique de faible niveau n’entraine pas ou peu d’augmentation du taux sanguin de plomb. Des corps étrangers contenant du plomb peuvent être retrouvés dans l’estomac lors de l’autopsie (huile de moteur, batterie…).  A l’autopsie, des lésions peu spécifiques peuvent être observées : un œdème cérébral avec une congestion péri-vasculaire et une dégénérescence hépatique, rénale et nerveuse (4).


Valeurs du plomb dans les organes : (3)

Type de prélèvementConcentrations normalesConcentrations significatives sur le plan diagnostique
Sang total (plombémie)< 10 μg/100 mL35-100 μg/100 mL
Foie< 0.5 mg/kg de matière humide10 mg/kg de matière humide
Rein< 1 mg/kg de matière humide10 mg/kg de matière humide

Pronostic : Mauvais pour les animaux avec signes nerveux important, moyen pour ceux avec signes nerveux discrets ou signes digestifs seuls.


 Traitement : Prévention principalement (trouver la source de l’intoxication et l’éliminer). Administration IV d’EDTA à 25 mg/kg quotidienne (3) pendant 3 à 5 jours – jusqu’à disparition des signes cliniques (efficacité limitée association plomb/EDTA majoritairement par voie urinaire) associé à un traitement symptomatique. Une administration de thiamine (2-3 mg/kg en SC) (3) permet de protéger le système nerveux central en empêchant l’entrée du plomb au niveau cellulaire.


Résidus : La mesure du taux de plomb dans le lait de tank est nécessaire si les vaches atteintes sont productrices de lait. Ces mesures doivent être répétées sur plusieurs mois suite à un traitement pour une intoxication au plomb, pour s’assurer de la disparition du plomb dans le lait.


Sources :

  1. PEEK SF, DIVERS TJ. REBHUN’S DISEASES OF DAIRY CATTLE, THIRD EDITION. Elsevier; 2018.
  2. Coulon S. Diagnostic différentiel des morts subites chez les bovins au pré : approche réalisée à partir de l’exploitation des bases de données du CNITV et de BNESST. Thèse d’exercice vétérinaire, Lyon; 2006.
  3. Buronfosse T, Gros K. L’intoxication par le plomb chez les ruminants. Bull GTV Hors-sér Neuropathol Rumin 2003. 2003;53‑4.
  4. Berny P, Queffelet S. Guide pratique de toxicologie clinique vétérinaire. Med’com; 2015. 352 p.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *